07 février 2008

Entrer en carême

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Entrer en Carême, c'est ouvrir sa porte
et réapprendre à bouger, à se déplacer, à vivre.
C'est refuser de rester figé dans ses positions,
ses dogmes ou ses certitudes absolues.

Entrer en Carême, c'est aussi changer de cap.
Mettre le cap sur Dieu en se laissant déranger
par les coutumes des autres, leurs idées,
leurs habitudes,leurs langues.
Se laisser surprendre par la musique de l'autre,
qui dit un autre rythme, un autre temps,
une autre chanson.

Entrer en Carême, c'est aussi se mettre à l'écoute
de la Parole, celle qui, au milieu des bavardages,
nous touche au coeur et nous arrache
non une larme, un billet de banque ou un chèque,
mais un geste de pardon, d'amour ou de paix.

Entrer en Carême, c'est se mettre à l'écoute
de la réussite de Dieu, celle qui accepte la blessure,
celle qui ne profite pas de l'échec du faible,
celle qui n'exploite pas la naïveté
ou la sueur du faible.

Entrer en Carême, c'est se mettre à l'écoute
de l'amour de Dieu.
Pas un amour maquignon qui ne tient compte
que du tour de taille, de la beauté des yeux
ou du regard.
Un amour qui vous apprend à lire autrement,
à parler, à partager, à se rencontrer autrement.
Robert Riber

06 février 2008

Carême de désir

Saint Augustin


Augustin naît le 13 novembre 354, en Afrique, à la frontière de l’Algérie et de la Tunisie. De cette région alors très prospère, Thagaste était une cité verte et riante entourée de montagnes boisées, avec ses pâturages, ses champs de blé, ses jardins maraîchers et ses vergers. La population, chrétienne depuis plus d’un siècle, avait déjà donné à l’Église plus d’un martyre et de célèbres pères de l’Église, tels que Tertullien, Lactance, et autres. Augustin naquit d’un père païen et d’une mère, Monique, élevée dans le christianisme. Patrice, le père, était propriétaire foncier et décurion i.e. responsable des services et des jeux publics. Monique, sa mère, femme d’une grande douceur, apportait la paix au foyer et un fidèle amour à son époux parfois dévoyé. La conversion d’Augustin au Christ fut une conversion à l’Écriture; la lecture de la lettre aux Romains de saint Paul fut particulièrement décisive. Le  texte qui suit est inspiré de la lettre aux Philippiens (ch. 3e), passage inoubliable qu ‘il conviendrait de lire avant d’aborder le commentaire qui suit.


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source photo : http://www.detonphoto.net/zgpmimi.htm
 
Toute la vie du vrai chrétien est un saint désir. Sans doute ce que désires, tu ne le vois pas encore : mais en le désirant, tu deviens capable d’être comblé lorsque viendra ce que tu dois voir. Puisque vous ne pouvez pas voir maintenant, que votre activité se contente de désirer.
 
Supposons que tu veuilles remplir une sorte de poche et que tu saches les grandes dimensions de ce qu’on va te donner, tu élargis cette poche, que ce soit un sac, une outre, ou n’importe quoi de ce genre. Tu sais l’importance de ce que tu vas y mettre, et tu vois que la poche est trop resserrée : en l’élargissant, tu augmentes sa capacité. C’est ainsi que Dieu, en faisant attendre, élargit le désir ; en faisant désirer, il élargit l’âme; en l’élargissant, il augmente sa capacité de recevoir.
 
Nous devons donc désirer., mes frères, parce que nous allons être comblés. Voyez saint Paul, élargissant son désir pour être capable de recevoir ce qui doit venir. Il dit en effet : « Certes, je ne suis pas encore arrivé, je ne suis pas encore parfait. Frères, je ne pense pas avoir déjà saisi le Christ.
 
Que fais-tu alors en cette vie, si tu ne l’as pas encore saisi ? Une seule chose compte : oubliant le chemin parcouru et tendu de tout mon être vers l’avenir, je suis mon élan vers le triomphe auquel je suis appelé de là-haut. Il dit qu’il est tendu et qu’il suit son élan. Il se sentait capable de saisir ce que l’œil n’a pas vu, ce que l’oreille n’a pas entendu, ce que le cœur de l’homme n’a pu concevoir.
 
Voilà notre vie : nous exercer en désirant. Le saint désir nous exerce d’autant plus que nous avons détaché nos désirs de l’amour du monde. Nous l’avons déjà dit à l’occasion : vide ce qui doit être rempli. Ce qui doit être rempli par le bien, il faut en vider le mal.
 
Suppose que Dieu veut te remplir de miel : si tu es rempli de vinaigre, où mettras-tu ce miel ? Il faut répandre le contenu du vase ; il faut nettoyer le vase lui-même ; il faut le nettoyer à force de travailler, à force de frotter pour qu’il soit capable de recevoir autre chose.
 
Parlons de miel, d’or ou de vin : nous pouvons désigner de n’importe quel nom ce qui est indicible, mais son vrai nom est Dieu. Et quand nous disons « Dieu », que disons-nous ? Ce mot désigne tout ce que nous attendons et pouvons attendre. Tout ce que nous pouvons dire est en-dessous de la réalité ; élargissons-nous en nous portant vers lui afin qu’il nous comble quand il viendra. Nous serons semblables à lui, parce que nous le verrons tel qu’il est.

02 février 2008

La Chandeleur

 

Anselm Grün


Anselm Grün, moine bénédictin, est abbé du monastère de Münsterschwarzach en Allemagne. Docteur en théologie et psychologue, il est accompagnateur spirituel. Ses livres connaissent un grand succès en Europe. Plusieurs ont été traduits en français. 

m-Bougie[1]


Quarante jours après Noël, le 2 février, on célébrait à Jérusalem depuis le v6 siècle une fête bien particulière. On l'appelait la fête de la Rencontre, ou de la Purification. À Rome, on célébrait alors la Présentation de Jésus au Temple. La piété populaire a toujours rapporté cette fête à Marie, et l'a nommée pour cette raison, en allemand, la fête des lumières de Marie (Mariä Lichtmess). Jadis, cette fête marquait la fin du temps de Noël. La réforme de la liturgie a abrégé ce temps ; elle en a fixé le terme à la célébration du baptême de Jésus. À Rome, le jour de la Présentation, on défilait en procession solennelle en portant des cierges. Il est probable qu'ainsi l'Église a repris à son compte l'usage païen de l'une de ces processions purificatrices qui se pratiquaient à Rome au début de février ; dans ce cas encore, on peut déceler les racines païennes de la fête, et constater qu'elle avait pour les chrétiens une signification archétypique. Mais quel sens cette fête peut-elle encore avoir aujourd'hui pour nous ?
 
Elle rappelle la rencontre de Marie et du vieillard Syméon. Celui-ci prend l'enfant dans ses bras et bénit Dieu en disant : « ... mes yeux ont vu ton salut, / que tu as préparé à la face de tous les peuples, / lumière pour éclairer les nations et gloire de ton peuple Israël » (Luc, 2, 30-32). Pour moi, le rituel de ce jour comporte l'écoute de la cantate de Bach Ich habe genug [cantate n° 821. Le texte dit : « J'ai assez vécu; avec un grand désir, j'ai pris dans mes bras le Sauveur, l'espérance des fidèles. Je suis comblé ! Je l'ai vu, ma foi a serré Jésus sur mon cœur. » Au quarantième jour après Noël, le but de cette fête apparaît dans ces paroles. Si, pendant ces semaines, j'ai vraiment médité sur Jésus, si je l'ai pris dans mes bras, alors je suis comblé, alors je peux laisser aller tout ce qui me retenait encore. La Nativité m'accompagne dans la vie quotidienne ; avec le Christ dans mon cœur, je peux la sur­monter autrement.
 
Dans ses chants, la liturgie manifeste un autre aspect encore de cette fête. L'antienne que l'on chante lors de la procession aux cierges dit : « Décore ta demeure nuptiale, Sion, et reçois le Christ Roi. Prends dans tes bras Marie, la Porte du Ciel ; car elle porte le Roi de la lumière éternelle. » Cette fête nous invite à recevoir le Christ dans la demeure intérieure de notre âme; la demeure ainsi évoquée, c'est notre cœur. Les noces entre Dieu et l'être humain ont lieu quand nous laissons le Christ entrer dans la demeure intérieure du château de notre âme, comme Thérèse d'Avila nomme la chambre nuptiale de l'âme humaine. Ce qu'exprime et célèbre la procession de la Chandeleur, c'est cela. Au début de l'Eucharistie, les fidèles se rassemblent dans l'église plongée dans l'obscurité ; le prêtre consacre les cierges et les allume. Ensuite, tous rentrent dans l'église avec les cierges allumés : cette image montre que la lumière de Jésus-Christ entre dans le temple de notre cœur et illumine tout ce qui y était encore obscur et en attente de la rédemption.
 
Beaucoup de communautés essaient aujourd'hui de reprendre et de renouveler la célébration de la Chandeleur, car elles sentent que cette fête nous communique quelque chose d'essentiel concernant notre existence même: il faut qu'en notre vie toujours plus de nouveaux espaces s'ouvrent à la lumière qui s'est allumée à Noël dans notre monde. La lumière de Noël nous renvoie à notre vie quotidienne, en nous donnant pour tâche d'y ouvrir à l'illumination des domaines toujours plus nombreux : ceux du travail, de la vie de famille, de la communauté dans le service divin de l’engagement politique. Il faut que la lumière de Noël éclaire, aujourd’hui encore les païens, comme il est dit dans le chant de louange de Syméon. Il faut qu’aujourd’hui encore cette lumière de l’amour comble le monde, en toi qui me lis, et autour de toi, afin que tous les humaines voient le salut qui exauce leur désir le plus profond.
  

Grün, Anselm, Petite méditation sur les fêtes de Noël, traduit de l’allemand par Claude Maillard. Albin Michel, Paris, 1999.


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23 janvier 2008

Voici que je me tiens à la porte

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C'est vrai ! Je me tiens à la porte de ton cœur, jour et nuit.
Même quand tu ne m'écoutes pas, même quand tu doutes que ce puisse être Moi, c'est Moi qui suis là.
 
J'attends le moindre petit signe de réponse de ta part,
le plus léger murmure d'invitation, qui me permettra
d'entrer chez toi.  Je veux que tu saches que chaque fois que tu m'inviteras,
je vais réellement venir. Je serai toujours là, sans faute.
 
Silencieux et invisible, je viens, mais avec l'infini pouvoir de mon amour. 
Je viens avec ma miséricorde, avec mon désir de te pardonner, de te guérir,
avec tout l'amour que j'ai pour toi; un amour au-delà de toute compréhension,un amour où chaque battement du cœur est celui que j'ai reçu du Père même.  " Comme le Père m'a aimé, moi aussi je vous ai aimé".
 
Je viens, assoiffé de te consoler, de te donner ma force, de te relever,
de t'unir à moi, dans toutes mes blessures.
Je vais t'apporter ma lumière. 
Je viens écarter les ténèbres et les doutes de ton cœur.
Je viens avec mon pouvoir capable de te porter toi-même
et de porter tous tes fardeaux.
Je viens avec ma grâce pour toucher ton cœur
et transformer ta vie.
Je viens avec ma paix,
qui va apporter le calme et la sérénité à ton âme.
 
Je connais tout de toi.
Même les cheveux de ta tête, je les ai tous comptés.
Rien de ta vie est sans importance à mes yeux.
Je connais chacun de tes problèmes, de tes besoins,
de tes soucis.  Oui, je connais tous tes péchés,
mais je te le redis une fois encore :
Je t'aime, non pas pour ce que tu as fait,
non pas pour ce que tu n'as pas fait.
Je t'aime pour toi même,
pour la beauté et la dignité que mon Père t'a données
en te créant à son image et à sa ressemblance.
C'est une dignité que tu as peut-être souvent oubliée,
une beauté que tu as souvent ternie par le péché,
mais je t'aime tel que tu es.
 Mère TERESA (1910-1997)  ...est arrivée en Inde en 1928 où elle a passé sa vie à servir le Christ dans les plus pauvres. En 1949, elle fonde la congrégation des Missionnaires de la Charité. Elle sera béatifiée à Rome le 19 octobre 2003.  D’autres prières de mère Térésa sur le site :http://apcalcutta.free.fr/teresa.htm

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17 janvier 2008

Regarder.

 1772[1]

Vous le croyez, puisque vous êtes ses disciples:
Le Seigneur est venu dans le monde et il est
Passé parmi les siens afin de poser sur eux,
son regard de miséricorde.
 
Ses yeux ont regardé l’adultère sans durcissement
Ni jugement, et son regard sur elle, était déjà le pardon accordé.
 
Ses yeux ont regardé les apôtres, sans s’arrêter
À la pauvreté des vêtements  et son regard sur eux
Était déjà l’appel de l’Evangile.
 
Ses yeux ont regardé le lépreux, sans glisser pudiquement
Sur ses plaies, et son regard sur lui, était déjà guérison
L’atteignant jusqu’au coeur.
 
Ses yeux ont regardé le mendiant, sans dégoût ni rejet,
et son regard sur lui, était déjà la tendresse de Dieu
entièrement remise entre ses mains.
 
Il continue à passer au milieu de nous, chaque jour,
et à poser sur nous son regard.
Le croyons-nous ?