26 novembre 2011

Ne fermez pas la porte

un texte de I MUVRINI

 

Sans titre 6.jpg

Ne fermez pas la porte.

Ils viennent de ces chemins où les hommes et les femmes
n'ont jamais eu qu'un coin du feu
pour y chanter la peine, l'amour et le travail.
Ils sont des gens du bord de l'eau et de la terre.
Là-bas, chez eux, où la parole commence par le chant ;
là-bas, où le vent de l'histoire des autres
a souvent déchiré la paix sur leurs rivages,
leur laissant au cœur de vieux chagrins.

Ne fermez pas la porte.

Ils viennent d'une mémoire qui n'est pas racontée
sur les bancs des écoles,
de ces mémoires que seules les pierres racontent encore.
Ce qu'ils ont au cœur est sur leurs visages.
Les mots qu'ils disent sont des mots simples,
qui parlent de vie, de dignité.
Quand d'autres pourraient croire
que chez eux tout est perdu,
Quand d'autres pourraient croire
que chez eux tout s'est arrêté
dans les veines de leur avenir,
Un jour, un jour on leur a dit
que leur langue n'en était pas une,
que leur terre était pauvre ...
Ils y ont consenti. Ils n'y ont jamais cru !

Ne fermez pas la porte.

Dans les mains,
comme un geste d'amour du côté humble de la vie,
ils portent un bouquet de leur terre.
Dans les mains, ils ont aussi une lumière,
comme celle qui brille dans leurs maisons,
là où ils vivent, au cœur de ces petits villages de pierres grises.
Leurs châteaux portent des noms comme des poèmes (...);
Leurs rêves à eux parlent de reconnaissance,
de fraternité, d'humanité.
Quand ils quittent ces châteaux-là,
plus ils s'en éloignent, plus leurs cœurs y font retour.
Mais ce qui les lie à leur terre
ne les oppose pas à tout ce qui les lie aux hommes,
à tous les hommes, à tous les peuples.
Ils ne sont pas que différents,
mais tellement semblables :
humains, faibles et forts à la fois.
Parfois, il fait nuit sur leur chemin.
Leur veilleuse tremble, il leur arrive de tomber.
Et, chez eux, quand un homme tombe,
quand une âme se perd,
quand un cœur s'égare,
d'autres lui donnent la main.
Le ciel reste muet,
on dit que les portes se ferment.
Chez eux, quand les hommes se taisent,
c'est qu'ils n'ont pas de mots pour le dire.
C'est qu'ils ont beaucoup à dire,
une blessure, une envie de guérir.
Les mots qui ne leur viennent pas danser sur les lèvres,
s'en vont hurler au fond de l'âme.
Le silence, c'est quelquefois leur révolte.
Le silence, c'est leur non-violence à eux :
leur cri, leur frontière, leur retrait d'avec l'injustice.
Chez eux, le mot amour ne se dit qu'avec précaution,
mais il est partout dans l'air.
Il est des mots dont ils pensent que moins on les prononce,
et plus ils se font entendre.

Ne fermez pas la porte.

Ce soir, autour du chant qui réchauffe,
la rencontre de soi,
la rencontre de l'autre,
ils cherchent un feu de joie.
Ils cherchent ensemble
le mot, le regard, le geste, la main,
qui pourrait faire frémir la montagne.
Comme une réponse à tous ce qui trahit.
Comme une réponse à tous ceux qui oublient.

Ne fermez pas la porte.

 

Voir la vidéo du jour

 

Une nouveauté à découvrir : sur la corde raide
C'est à voir et à offrir !

Publié dans Général | Commentaires (0) |  Facebook | |  Imprimer | |

Les commentaires sont fermés.