03 juillet 2008

UN ROI SANS PUISSANCE

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Il dit qu’il est la vérité.
 
C’est la parole la plus humble qui soit. L’orgueil, ce serait de dire: la vérité, je l’ai. Je la détiens, je l’ai mise dans l’écrin d’une formule. La vérité n’est pas une idée mais une présence. Rien n’est présent que l’amour. La vérité, il l’est par son souffle, par sa voix, par sa manière amoureuse de contredire les lois de pesanteur, sans y prendre garde.
 
Que des millions d’hommes se soient nourris de son nom, qu’ils aient peint son visage avec de l’or, fait retentir sa parole sous des coupoles de marbre, cela ne prouve rien quant à la vérité de cet homme. On ne peut accorder crédit à sa parole en raison de la puissance historique qui en est sor­tie: sa parole n’est vraie que d’être désarmée.
 
Sa puissance à lui, c’est d’être sans puissance, nu, faible, pauvre, mis à nu par son amour, affaibli par son amour, appauvri par son amour.
 
Telle est la figure du plus grand roi d’humanité, du seul souverain qui ait jamais appelé ses sujets un à un, à voix basse de nourrice. Le monde ne pouvait pas l’entendre. Le monde n’entend que là ou il y a un peu de bruit ou de puis­sance. L’amour est un roi sans puissance, Dieu est un homme qui marche bien au-delà de la tombée du jour.
 Christian  BOBIN, écrivain.

Extrait de « l’homme qui marche », éd. Le temps qu’il fait

Commentaires

Joli coucher de soleil !

Écrit par : The Shadow | 03 juillet 2008

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