J'ai fait un rêve…
Source: http:www.protstnicolas.org


Texte de l'intervention du Cardinal Martini
lors du Synode des Evêques d'Europe (1999)


"J'ai écouté avec un vif intérêt toutes les interventions faites jusqu'à présent en cherchant à comprendre en quoi elles répondent à la  question: Comment Jésus-Christ vivant dans l'Eglise peut-il être source d'espérance pour l'Europe?

Mais avant d'exprimer mon propre avis, je voudrais faire mémoire d'une personne dont certains d'entre nous se rappellent encore la présence dans cette salle, et que le Seigneur a rappelé à lui: le cardinal Basil Hume, archevêque de Westminster.  Il a souvent commencé ses interventions en synode par ces paroles: "I had a dream", "J'ai fait un rêve".

Ces jours-ci, en écoutant les intervenants, j'ai moi aussi fait un rêve, ou plutôt plusieurs. J'en évoque trois:

Avant tout, celui que, à travers une familiarité toujours plus grande avec la sainte Ecriture lue et priée en groupes et en communautés, les hommes et les femmes d'Europe ravivent en leur coeur l'expérience de feu qui fut celle des disciples sur la route d'Emmaüs (
Instrumentum laboris no. 27), pour renvoyer à ce qu'a déclaré Mgr Egger, évêque de Bolzano-Bressanone.  Dans mon expérience aussi, la Bible lue et priée, en particulier par des jeunes, est le livre de l'avenir du continent européen.

En second lieu, le songe que, par son service prophétique, sacerdotal et diaconal, la paroisse continue à actualiser dans nos pays cette présence du ressuscité que purent expérimenter dans la fraction du pain les disciples d'Emmaüs. Au cours de ce synode, on a déjà émis nombre de propos mettant en évidence le rôle des mouvements d'Eglise touchant l'animation spirituelle de l'Europe. Mais il est nécessaire que les membres des nouvelles communautés s'insèrent de façon vitale dans la communion de la pastorale paroissiale et diocésaine pour mettre à la disposition de tous les dons particuliers reçus du Seigneur et pour les soumettre à la vérification du peuple de Dieu tout entier (
Instrumentum laboris n°. 47).

Si cela n'a pas lieu, c'est la vie de toute l'Eglise qui en souffre, tant celle de la communauté paroissiale que celle des mouvements eux-mêmes. Si au contraire on réalise une expérience efficace de communion et de co-responsabilité, l'Eglise apparaît plus facilement signe d'espérance et alternative crédible à la désagrégation sociale et éthique dont tant ici se plaignent.

Un troisième songe est que le retour joyeux des disciples d'Emmaüs repartant à Jérusalem pour rencontrer les apôtres devienne un stimulant pour répéter de temps en temps, au cours du siècle qui s'ouvre, une expérience de confrontation universelle entre évêques, expérience susceptible de dénouer certains nœuds disciplinaires et doctrinaux qui n'ont peut-être été que peu évoqués ces jours-ci, mais qui réapparaissent périodiquement comme des points brûlants sur le chemin de l'Eglise européenne, mais non seulement européenne.

Je pense de façon générale aux approfondissements et aux développements de l'ecclésiologie de communion de Vatican II.

Je pense au manque déjà dramatique en certains lieux de ministres ordonnés et à la difficulté croissante d'un évêque pour pourvoir au soin des âmes sur son territoire, vu l'insuffisance de ministres de l'Evangile et de l'Eucharistie (IL 14).

Je pense à certains thèmes concernant la place de la femme dans la société et dans l'Eglise (IL 48), à la participation des laïcs à certaines responsabilités ministérielles (IL 49), à la sexualité, aux relations apports avec les Eglises orthodoxes surs, et de façon plus générale au besoin de raviver l'espérance oecuménique (IL 60-61); je pense au rapport entre la démocratie et les valeurs, ou entre les lois civiles et les lois morales.

Nombre de ces thèmes sont déjà apparus au cours des précédents synodes, tant généraux que particuliers, et il est important de trouver des lieux et des instruments adaptés à leur examen attentif.

Pour ce faire, ni les recherches sociologues ni les récoltes de signatures ne constituent des instruments adéquats.  Ni non plus les groupes de pression. Mais peut-être un synode y suffirait-il.

Certains de ces nœuds nécessitent probablement un instrument  collégial plus universel et plus autorisé où il serait possible de s'affronter en toute liberté dans le plein exercice de la collégialité épiscopale, dans l'écoute du Saint-Esprit et en veillant au bien commun de l'humanité tout entière.

Nous sommes conduits à nous demander si, quarante ans après la convocation de Vatican II, dans une Église désormais toujours plus diversifiée, on ne voit pas mûrir l'idée de l'utilité et pour ainsi dire de la nécessité au cours de la décennie à venir d'une confrontation collégiale et autorisée entre tous les évêques, sur certains des thèmes clés qui se sont posés au cours de ces quarante années.

On a de plus le sentiment qu'il serait bon et utile pour les évêques d'aujourd'hui et de demain de répéter l'expérience de communion, de collégialité et d'Esprit Saint qu'ont faite leurs prédécesseurs à Vatican II, expérience dont seuls quelques rares témoins gardent la mémoire vivante. Avec l'intercession de Marie, qui était présente avec les apôtres au Cénacle, nous prions le Seigneur de nous donner sa lumière pour discerner si, comment et quand nos rêves pourrons devenir réalité. "

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