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Les Apôtres étaient allés, deux par deux, dans les villages des environs pour annoncer la Parole de Dieu, guérir les malades et chasser les esprits mauvais. Ils avaient sans doute également écouté les gens leur raconter leurs rêves et leurs cauchemars, leurs espoirs et leurs désespoirs, leurs projets et leurs déceptions. Ils avaient trimé dur. Ils étaient sûrement fatigués. Mais en même temps, ils étaient contents du travail accompli. C'est pourquoi ils se réunirent auprès de Jésus pour lui raconter ce qu'ils venaient de vivre. Un peu à la manière des enfants qui reviennent de l'école et qui racontent à leur maman ce qui s'est passé en classe. Un peu à la manière d'un benjamin qui raconte à son aîné ses premières expériences de travail ou de vie. Jésus les écouta avec joie et reconnaissance. Il voyait certes en eux de bons collaborateurs et il était content de leur premier apprentissage apostolique. Mais il les savait fatigués et peut-être devinait-il qu'ils avaient besoin de parler encore de leurs expériences récentes, de se faire confirmer dans leur rôle de missionnaires.
C'est pourquoi il les invita à venir à l'écart, dans un endroit désert. Il les invita à s'éloigner pour un temps de ce qui faisait leur vie quotidienne. Il leur fit prendre un certain recul face à ce qu'ils venaient de vivre; il leur fit marquer une certaine distanciation vis-à-vis de leur travail. Il les invita également à se reposer un peu. L'intériorité est en effet fort difficile dans l'agitation, l'activisme, l'éparpillement, la course continuelle. L'intériorité suppose du calme, du silence, de la paix, une certaine sérénité, même extérieure. L'intériorité exige la capacité de s'arrêter, de stopper la «course contre soi-même» (Lorenz), la course contre le temps, la course contre l'«ouvrage à faire», pour «se ramasser», se recueillir, se reposer... laisser descendre la mousse dans sa vie ou laisser calmer la vague sur son lac personnel.
Le Seigneur les invita à venir à l'écart dans un endroit désert pour se reposer un peu avec lui. L'intériorité n'est pas simple détente physique ou psychologique (encore que celle-ci soit bien commode et puisse y contribuer grandement). Elle est surtout paix avec le Seigneur et dans le Seigneur. Elle consiste souvent à être avec lui dans le silence et la tranquillité, dans la solitude, dans le secret aussi. Elle consiste également à nous raconter au Seigneur, pour qu'il nous confirme dans ce que nous sommes et dans ce que nous faisons ou tout simplement pour nous réchauffer à son contact: «Je tiens mon âme en paix et en silence... comme un enfant tout contre sa mère.» (Psaume 131, 2)
Jules BEAULAC, Je parlerai à ton cœur, Médiaspaul 1995, p. 25 s.
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