|
Le charisme salésien aux origines :
Don Bosco
Père Michel.
Nous avons dit dans notre prière : « Seigneur, notre Dieu, tu as voulu nous laisser libres de tracer les chemins de notre avenir ». C'est vrai qu'il nous laisse libres, mais qu'est-ce qu' Il ne nous donne pas d'occasions, de circonstances pour nous éclairer sur la route à prendre ! Et c'est un peu dans ce sens que j'ai essayé de regarder le chemin de Jean Bosco . Et pour cela, j'ai regardé le premier article des Constitutions des Salésiens, et, étrangement, le premier article du Règlement de Vie des Coopérateurs qui est exactement le même. C'est le texte fondateur , et de la vocation de Don Bosco et du destin que lui préparait l'Esprit Saint :
Extraits du Règlement de Vie Apostolique des Salésiens Coopérateurs :
Art 1. Pour contribuer au salut de la jeunesse, cette part la plus délicate et la plus précieuse de la société humaine, l'Esprit Saint suscita avec l'intervention materne! le de Marie, Saint Jean Bosco. Il forma en lui un coeur capable de se donner entièrement, et lui inspira une méthode d'éducation tout imprégnée de la charité du Bon Pasteur. Art 28. Le centre et la synthèse de l'esprit salésien , c'est cette « chanté pastorale » ...(Don Bosco) l'a signifiée dans le nom de « salésiens », en choisissant comme patron saint François de Sales, modèle, d'amabilité, de zèle apostolique et d' humanisme véritable.
Pour un croyant, il n'y a pas de hasard ... tout ce qui arrive est au moins permis par Dieu , et lorsque Celui-ci demande à quelqu'un de réaliser quelque chose de grand, lorsqu'il lui donne une vocation. II met sur son chemin des événements et des personnes qui lui permettent de mieux préciser et remplir cette vocation. Et ces personnes , ces événements sont comme des indicateurs, des lumières soudaines , des orientations nouvelles, parfois à 180 degrés. Et quand on relit à l'envers la vie de Don Bosco, et que l'on remonte jusqu'à sa naissance, on découvre tout ce qui l'a marqué dans sa chair, dans son coeur, dans sa sensibilité d'homme et de Piémontais ... et le choix de la mission, la manière de s'y engager.
Tout cet ensemble d'événements, de personnes, a orienté les choix de Jean Bosco mais l'énergie qu'il puisera, la confiance qui le soutiendra, l'espérance qui l'animera - et par-dessus tout, le charisme qu'il manifestera - trouvent leur source, leur fondement, dans la découverte de l'Amour de Dieu pour chacun : cette merveilleuse nouvelle que François de Sales avait découverte avant lui ; ce François qui sera son inspirateur et sa référence spirituelle.
Mais revenons à cette vocation incarnée dès son enfance.
Des événements, il y en a eu dans la vie de Jean
La mort de son papa alors qu'il a deux ans et demi, le départ forcé de la maison maternelle, la solitude chez les Moglia, et surtout à Chiéri. Comment ne pas déceler dans ces faits, la source qui le pousse à se soucier tout particulièrement des orphelins, des démunis ? A neuf ans, il y a aussi le songe que nous connaissons tous et qui le suivra jusqu'au dernier jour : sa mission.
II découvre Turin alors que le Piémont est en pleine révolution industrielle ... et des masses de jeunes qui s'agglutinent, sans appui, sans moyen. Il découvre de façon brutale avec Joseph Cafasso, les prisons des jeunes. Le choc fut si fort qu'il décide sur le champ de s'occuper des jeunes « pour qu'ils ne viennent plus jamais ici » dit-il. Ce choc est d'autant plus fort qu'il rejoint ce songe de ses neuf ans. Ces gosses qui se battent : ce sont ceux qu'il a vu sur la plaine. Et commence son aventure avec les jeunes.
Devenu prêtre, aidé par Joseph Cafasso, il refuse le poste de précepteur chez des nobles génois, un rôle de chapelain à Muriaido et à Castelnuovo...Après la rencontre de Barthélemi Garelli, des centaines le rejoignent chaque fois que c'est possible. Cafasso lui a trouvé un poste de précepteur dans un orphelinat de filles chez la marquise Barollo ... Et c'est elle qui le confirmera dans sa mission en exigeant qu'il choisisse entre ses filles et ses garçons. Tout cela définit déjà sa route.
Enfin et surtout, l'événement déterminant va surgir au Valdocco, dans cette maison Pinardi qu'il achète. Epuisé, il tombe gravement malade, les médecins craignent le pire. Commence alors une croisade extraordinaire des garçons qui se relayent à la basilique de la Consolata et qui iront y faire des promesses insensées pour que Don Bosco guérisse. Le miracle a lieu. Don Bosco revient affaibli, mais porté par tous ses garçons sur un fauteuil qu'ils ont acheté. Ils pleurent et lui aussi. Et là, il fait la déclaration la plus forte qu'on peut assimiler à un voeu solennel : « Ma vie, je vous la dois, désormais ma vie sera entièrement pour vous, jusqu'à mon dernier souffle ». La boucle est bouclée, le songe des 9 ans est définitivement devenu une réalité: les jeunes seront son chemin de sainteté.
Désormais, Don Bosco découvre que ses jeunes, si mal perçus par les turinois, sont capables d'engagements généreux. Il saura un jour que c'est parmi eux qu'il trouvera des collaborateurs sûrs ... à travers Dominique Savio, Michel Rua et bien d'autres, il discernera des jeunes capables de se donner à un idéal exigeant, et c'est grâce à eux qu'il osera créer une nouvelle famille religieuse.
Bien sûr, à travers tous ces événements ont surgi des personnes qui ont toutes joué un rôle dans la marche en avant de Jean Bosco, à commencer par sa mère.
Maman Marguerite viendra le rejoindre à la maison Pinardi. (Il en a tellement besoin, que quand elle meurt, il n'a d'autre refuge pour pleurer sa peine que la Consolata) . Il faut se rappeler ses phrases : quand il prend la soutane: « J'aime mieux que tu quittes cet habit tout de suite plutôt que de le déshonorer un jour ». « Sache que si tu deviens riche, je ne mettrai plus jamais les pieds chez toi ». « Commencer à dire la messe , c'est commencer à souffrir pour les autres ».
L'abbé Calosso. Il l'aimera comme un père , un second père, lui qui lui fera faire du chemin dans la découverte de la paternité de Dieu.
Louis ComoIIo, ce compagnon de séminaire qui dira souvent à Jean: « Jean ! Ta violence me fait peur ! ». Ce qui lui rappellera chaque fois le songe qui demandait d'user de 1a douceur.
Joseph Cafasso (rôle très important). Don Cafasso sera son confesseur, son confident spirituel pendant des années. Parce que pauvre et ayant peur d'affronter le monde en face. Don Bosco se propose d'entrer chez les franciscains. Joseph Cafasso l'en dissuade et c'est lui qui l'emmène dans les bidonvilles de Turin…
Il faudrait en citer bien d'autres comme Michel Rua ( Il lui dira en mettant sa main dans la sienne : « Michel, nous ferons tout de moitié » ), Marie Mazzarello, Pie IX .
Oui , Jean Bosco a eu dans sa vie des rencontres multiples. Son mérite a été de faire de toutes ces rencontres un tremplin pour aller plus loin, là où Dieu désirait qu'il aille. // serait bon, parfois, que l'on fasse mémoire, dans nos vies de tout ce qui nous a aidé a grandir. Il serait tout aussi important de se dire que nous aussi , dans les rencontres que nous faisons, nous pouvons être. un point d'éclairage, un moment d'orientation pour certains et certaines. Nous sommes tous responsables les uns des autres.
Mais parlons de ce Dieu qui est omniprésent dans la vie de Jean Bosco. S'il est un inconditionnel des jeunes, il est aussi un inconditionnel de Dieu. Et toute sa quête - sa mission si vous voulez - se résumera dans cet effort constant de les rapprocher l'un de l'autre.
Et là intervient saint François de Sales. Xavier Thévenot n'hésite pas à dire, comme Don Vigano, que François de Sales fut un personnage structurant de la vie de Jean Bosco.
Ce qui est à souligner, c'est que malgré les trois cents ans qui les séparent, Jean Bosco a eu pour François de Sales une sorte d'attrait irrésistible , et tout ce qu'il créera, fondera, par sa volonté, portera un nom salésien. « Salésienne » la congrégation, la Famille, la première église et la première oeuvre. A son premier maître des novices, don Barbéris, il demandera d'écrire une biographie de François.
Même la devise de Don Bosco « Donne moi des âmes, garde le reste », vient de François de Sales: et il désirait qu' elle soit la devise de tout salésien. François de Sales était reconnu comme le docteur de la Charité, de la Bonté , de la douceur. Don Rinaldi disait même que tout salésien devrait faire un quatrième voeu : celui de la bonté. Derrière ce mot « bonté », dit Xavier Thévenot, Don Bosco voulait privilégier les attitudes de dialogue, de convivialité, d'amitié, de patience, de joie.
Donc, François de Sales, ce n'est pas, dans la vie de Don Bosco, un saint occasionnel, ce n'est pas l'objet d'un engouement passager: c'est une admiration profonde qui s'amplifiera. Il le décrit comme celui qui pense comme il aurait voulu penser, comme celui qui a les mots justes pour décrire ce qu'il éprouve dans son coeur. Il dira : « François de Sales m'a conforté dans mes engagements, m'a confirmé dans mes convictions ». Ce qui frappe, c'est la manière dont chacun des deux est arrivé à la conviction que Dieu est Amour et rien d'autre. Une conviction qui va unifier toute leur personne, et engager celle-ci dans un mouvement irréversible : Dieu m'aime très fort, il me demande d'aimer comme lui. Il faut que j'y aille.
Don Bosco pensait très fort qu ' être éducateur, c'est d'abord vouloir aimer
Des exemples:
Dans « L'introduction à la vie dévote », François montre que la relation avec Dieu est accessible à tous, à tout âge , en toutes conditions : que l'on soit soldat ou soubrette .grande dame ou domestique, tous sont aimés également de Dieu et tous peuvent entrer dans son intimité . C'est d'ailleurs ce qu'il demande. Don Bosco fera le même discours aux jeunes : eux aussi sont appelés à une intimité profonde avec le Seigneur. Il est persuadé, comme le dit bien Jean-Marie Petitclerc, qu'en chaque jeune, il y a un saint qui sommeille, il y a quelqu'un qui peut reconnaître que Dieu est passionné d'amour pour lui, quelqu'un qui peut se passionner pour Dieu..
Autre exemple. Don Bosco se sachant aimé de Dieu - et sachant qu'il aime tous les hommes : il aimera les jeunes et voudra s'en faire aimer. Il appliquera , si l'on veut, pour les jeunes et les autres- la même pédagogie que Dieu exerçait avec lui, c'est-à-dire : il fait confiance en chaque jeune, il croit que tout être humain peut devenir meilleur. C'est un optimiste qui ne se laisse pas décourager. Il est donc patient, il pardonne, il relance, il prend à son compte la magnifique page de Saint Paul : l'amour supporte tout, et , bien sûr, il entre avec toute sa foi et son courage dans le magnifique slogan de François de Sales qui éclaire tout le système préventif de Don Bosco : « II faut tout faire par amour et rien par force ». Quand on ne fait rien par force, c'est qu'une grande confiance s'est installée. C'était l'objectif premier de Don Bosco.
N'enlevons pas à Don Bosco ce qui lui est propre : cette formidable capacité de traduire dans le inonde des jeunes ses convictions profondes et de susciter parmi eux des saints
|
|