15 février 2016

Sobriété

1Sans titre 6.jpg

Parmi les pratiques pénitentielles que nous propose l'Église, surtout en ce temps de Carême, il y a le jeûne. Il comporte une sobriété spéciale dans la prise de nourriture, étant saufs les besoins de notre organisme. Il s'agit d'une forme traditionnelle de pénitence qui n'a rien perdu de sa signification, et que l'on doit même peut-être redécouvrir, surtout en cette partie du monde et dans ces milieux où non seulement la nourriture abonde mais où l'on rencontre parfois des maladies dues à la suralimentation.

À l'évidence, le jeûne pénitentiel est très différent des régimes alimentaires thérapeutiques. Mais, à sa manière, on peut y voir comme une thérapie de l'âme. En effet, pratiqué en signe de conversion, il facilite l'effort intérieur pour se mettre à l'écoute de Dieu. Jeûner, c’est réaffirmer à soi-même ce que Jésus répliqua à Satan qui le tentait au terme de quarante jours de jeûne au désert : « L'homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu » (Mt 4,4).

Aujourd'hui, spécialement dans les sociétés de bien-être, on comprend difficilement le sens de cette parole évangélique. La société de consommation, au lieu d'apaiser nos besoins, en crée toujours de nouveaux, engendrant même un activisme démesuré… Entre autres significations, le jeûne pénitentiel a précisément pour but de nous aider à retrouver l'intériorité.

L'effort de modération dans la nourriture s'étend aussi à d'autres choses qui ne sont pas nécessaires et apporte un grand soutien à la vie de l'esprit. Sobriété, recueillement et prière vont de pair. On peut faire une application opportune de ce principe en ce qui concerne l'usage des moyens de communication de masse. Ils ont une utilité indiscutable mais ils ne doivent pas devenir les « maîtres » de notre vie. Dans combien de familles le téléviseur semble remplacer, plutôt que faciliter, le dialogue entre les personnes ! Un certain « jeûne », dans ce domaine aussi, peut être salutaire, soit pour consacrer davantage de temps à la réflexion et à la prière, soit pour cultiver les rapports humains.

St Jean Paul II
Angélus du 10 mars 1996 

Voir la vidéo du jour ►

13 février 2016

Choisir

201602062.jpg

Toi qui es captivé par le mystère de la condition humaine, l’ignores-tu ?
Le Christ ouvre en chacun une voie d’espérance. Avec toi il traverse même les contradictions intérieures, les peurs et la joie, les doutes et la confiance, les révoltes et le pardon.

Se résigner face aux contradictions ? Non pas la résignation, mais lui donner ta confiance. Dans la condition humaine, le Ressuscité jamais ne refuse le secret d’une présence, et même d’un bonheur. Non pas la résignation, mais comme un lâcher prise intérieur, t’abandonner à l’Esprit Saint, au Christ vivant.

Abandonne-toi. Lui, le Ressuscité, a déposé au-dedans de toi sa confiance. Il offre cette guérison des déchirures qui, dans l’Évangile, porte le non de réconciliation. Oui, repose-toi en paix sur Dieu seul. Sinon, comment découvrir jour après jour ce qu’il place en avant de toi ?

L’Évangile place devant un choix. Ou bien donner sa vie, non pas quelques fragments, mais toute son existence. Ou bien se servir soi-même et suivre sa propre ombre, entre autres dans la poursuite du prestige humain. Impossible de marcher sur ces deux voies. Choisir le Christ Jésus suppose de n’en suivre qu’une. Choisiras-tu le Christ ?

Le Christ n’attend que ton choix, un choix de l’essentiel repris sans cesse, en plein milieu de tes activités. Choisir ! Personne ne le peut pour toi. Toi, commence. Donne-lui ta confiance. N’attends pas que ton cœur soit changé : jour après jours, le Christ le changera.

Frère Roger Schutz
Taizé

Voir la vidéo du jour ►

 

11 février 2016

LA PÉDAGOGIE DU DÉSERT.

20160206.jpg

Dans la Bible, le désert évoque déjà des images contradictoires. Terre de malédiction où la vie est rare et où l’homme survit difficilement il est le lieu symbolique des bêtes malfaisantes. des forces hostiles, des démons, de la mort. Mais, paradoxalement, le désert est aussi dans la conscience collective du peuple biblique. le temps et le lieu où il a pris conscience d’une nouvelle liberté, où il a reculé les limites de l’impossible, où il a fait l’expérience d’un Dieu transcendant et intime, feu brûlant et brise légère, engagé dans sa propre histoire.

Ces quarante ans de marche au désert sont la durée symbolique d’une vie. Durée nécessaire afin que l’homme ait le temps de découvrir, à travers ses multiples faims et ses multiples soifs, le seul vrai Pain et la seule source d’Eau Vive capables de le faire vivre toujours.

Les auteurs bibliques ont discerné dans l’Exode du peuple hébreu un Événement-Parole de révélation. Ce "passage au désert" est une pédagogie exemplaire et permanente du Dieu de l’Alliance. Elle nous concerne toujours. Car qui d’entre nous (quel peuple ? quelle Église ?) ne doit-il pas, un jour ou l’autre de son histoire, faire l’expérience d’une éprouvante solitude, une "traversée du désert" qui nous oblige à poser les questions fondamentales sur notre destinée personnelle et collective.

Toute « traversée du désert » est à la fois une épreuve et un temps privilégié. Épreuve qui nous dépouille de nos masques, de nos mensonges, de nos pseudo-sécurités. Temps privilégié où, simplifié, dépouillé, ne pouvant plus tricher, nous sommes amenés à assumer, en vérité, notre radicale pauvreté, notre finitude, à pressentir la proximité de Dieu, à prendre conscience de notre vraie Faim ou de notre vraie Soif.

Le temps de prendre conscience que l’homme est un être inachevé en quête d’un accomplissement qui dépasse ses seules possibilités, un être qui a faim d’Absolu. Et l’itinéraire du peuple hébreu, de la servitude à la liberté, et celui du Christ pascal, de la mort à la résurrection, éclairent la signification de tous nos « déserts » et de notre Faim insatiable, celle de la Terre Promise, celle du Royaume du Père.

Prendre quelques jours de « désert ». seul ou dans un monastère, n’est-ce pas, de temps en temps, vivre, symboliquement ramassé, l’itinéraire de toute notre vie au cours de laquelle nous devons assumer des « déserts » parfois dramatiques. On choisit rarement « son » désert. Il est différent pour chacun. Mais, tôt ou tard, il faut bien le traverser !

Sur le plan personnel ce sera une épreuve morale ou de santé, une période de doute, d’aridité, de rupture, une impression de tourner en rond … Sur le plan ecclésial, la « traversée du désert » peut être une Église réduite au silence, martyrisée ou somnolente … Sur le plan collectif, ce temps de "désert" peut être celui d’une minorité écrasée, d’un peuple déchiré par la guerre ou par un sous-développement endémique …

Désert du couple. Désert du cloître. Désert du croyant. Désert de la maladie. Désert de la solitude. Désert de la pensée ou du coeur. Aucune « traversée de désert » n’est semblable mais il y a des constantes communes que nous trouvons déjà dans la marche exemplaire du peuple de l’Alliance.
Ce temps de solitude s’inscrit dans l’itinéraire pascal de toute vie. Temps où chacun de nous, éternel enfant prodigue, se souvient que sa vie est un exode vers la Terre Promise, le pays de l’Amour parfait, un immense Retour vers la Maison du Père.

Solitude qui nous rappelle que se convertir c’est, chaque matin, sortir de soi-même, se décentrer, changer de direction, pour marcher vers notre Père et vers nos frères. Solitude au cours de laquelle chaque peuple, chaque communauté, chacun de nous est invité à revivre les choix fondamentaux du peuple hébreu et du Christ au désert.

Il faut toute une vie pour que l’homme ait le temps de découvrir qu’à travers ses multiples faims, il a surtout faim d’être aimé et d’aimer pour toujours et que le seul vrai Pain capable de le combler est l’Absolu de Dieu, sa Parole, sa Vie et son Amour. Finalement laissé à lui-même, l’homme est un être dont les faims sont assez élémentaires. Pendant des siècles, l’espérance du Peuple de Dieu n’a guère dépassé l’horizon d’une terre grasse et de troupeaux féconds.

Seules quelques figures prophétiques, animées par l’Esprit vont le pousser à creuser sa vraie faim.
Comme ces Hébreux qui murmurèrent dans le désert, nous préférons souvent manger un pain qui a le goût de la servitude. Les pains de l’esclavage sont multiples. Pain de la facilité. Pain du confort. Pain de la routine. Pain de la lâcheté. Pain de la compromission … Aussi, pour creuser notre vraie faim, avons-nous besoin de ces temps de "désert" choisi ou assumé.

Difficile et bienheureuse « solitude » qui nous découvre que la grandeur de l’homme est d’être un marcheur qui, de campement en campement, n’en finit pas de passer de la servitude à la terre de liberté. La solitude de nos "déserts" est toujours ce temps où chacun de nous, confronté avec la dure réalité, murmure, comme les Hébreux, la grande interrogation de l’homme : « Y a-t-il un Dieu quelque part et si oui, marche-t-il vraiment avec nous " (Ex 17,7).

Michel HUBAUT 
extraits "les Chemins du Silence" (Edts Franciscaines)

Voir la vidéo du jour ►

10 février 2016

Carême

201602074.jpg

À peine avons-nous prononcé ce mot que nous pensons :
faire des efforts, des privations, tenir des résolutions,
en un mot froncer les sourcils et prendre la tristesse au sérieux !
Un Carême qui part de nous pour aller à Dieu, 
au lieu de partir de Dieu pour aller à nous.

En fait, il faudrait essayer d’inverser les choses :
le Carême, ce n’est pas de tenir, ni de retenir,
c’est au contraire d’ouvrir, de laisser la Vie nous envahir,
nous traverser et nous transformer,
pour qu’elle se répande autour de nous.

Alors la vie peut nous convertir,
opérer en nous un retournement
qui nous fait retrouver la Source qui nous habite.

Dans l’Évangile de la Passion selon saint Matthieu,
nous pouvons lire : « Le Maître te fait dire :
“Mon temps est proche, c’est chez toi que je vais faire la Pâque” »
(Matthieu 26,18).

Voilà ce que Jésus nous dit à chacun : Mon temps est proche.
C’est le temps du déploiement de mon amour pour toi jusqu’au bout,
le temps où je désire « faire ma Pâque chez toi »,
dans ton cœur profond, dans la vérité de ton être et de ta chair.

Pâque est un mot qui signifie : passage.
Laisse-moi passer en toi, laisse-moi passer chez toi ! 
Laisse-moi te faire passer de la mort à la Vie,
à travers tes faiblesses, tes souffrances, tes peurs,
offertes et ouvertes à mon Cœur transpercé,
déposées et remises dans la tendresse de mes Mains crucifiées.

Est-ce que tu veux bien me laisser donner à ton temps humain,
à ton histoire et à ton quotidien,
leur sens radical et toute leur mesure intérieure ?

Soeur Marie-David
(abbaye ND de Jouarre)

Voir la vidéo du jour ►

201602064.jpg

Pour vivre le temps du Carême :
Car Aime, des chemins vers Pâques

08 février 2016

Eduquer à la Paix

201602063.jpg

Éduquer à la paix, c’est aider un jeune à passer du rêve à la réalité.

Tout éducateur le sait bien : plus que les discours, les actes enfantent la Paix.
Des gestes simples et vrais ont parfois plus de force que les grandes opérations médiatiques.
Agir vers les autres crée le lien social et relationnel, oriente les énergies de chacun au service d’un vivre ensemble.

Éduquer à la Paix, c’est aider le jeune à faire l’inventaire de ses conflits.

Comment en parler avec les autres ? Comment accepter que la Paix ne soit jamais définitivement acquise ? La Paix n’est pas qu’absence de guerre, elle n’est pas l’affaire exclusive des dirigeants, elle est d’abord une œuvre jamais terminée en nous-même.

Dans le domaine de la paix nous ne sommes que des artisans.

« Heureux les artisans de paix ! ».
On ne s’improvise pas artisan, on y est initié. Le sérieux dans le travail est un gage de qualité, conscient que chaque coup de rabot, de pinceau ou de marteau est au service de l’œuvre. Et lorsque l’artisan entrevoit son oeuvre, il sait qu’elle vient d’au-delà de lui alors qu’il en est le créateur.
Généralement les bons artisans sont doux et humbles… de cœur.

« La justice est la mère de la paix », dit la Bible

L’injustice est sans conteste à la racine des conflits, de la violence et de la haine.
Vouloir la justice est aussi un apprentissage. Nous sommes tous contre les injustices, mais combien d’entre nous sont prêts à donner d’eux-mêmes pour que la justice règne.  Il n’y a pas de justice sans que chacun partage, donne de son essentiel, de ses biens, de ses talents, de sa compétence. Tant de refus de paix s’enracinent dans la volonté de posséder la part de l’autre, sa terre, ses biens.

Éduquer à la justice, c’est aider un jeune à sortir du cercle dont il serait le centre, et découvrir que le pauvre, l’autre, est au centre.

Le beau titre de « messager » accompagne la Paix.

Dans un monde qui communique, vite, au plus loin, en direct, devenir « annonceur » et « présentateur » de la Paix est un merveilleux projet.  La dimension internationale ouvre là un champ immense.

« Tu apprends plusieurs langues, tu veux partir au bout du monde, quel est donc le message de Paix que tu apporteras…, que tu partageras ? »

Père Jean-Marie Mallet-Guy
(ancien aumônier général des Scouts et Guides de France)

Voir la vidéo du jour ►