22 juin 2012

Les signes des temps où nous sommes

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    Le fait que l'on enregistre aujourd'hui, dans le monde, malgré les vastes processus de sécularisation, une exigence diffuse de spiritualité, qui s'exprime justement en grande partie dans un besoin renouvelé de prière, n'est-il pas un « signe des temps » ?  Les autres religions, désormais amplement présentes dans les territoires d'ancienne chrétienté, proposent aussi leurs réponses à ce besoin, et elles le font parfois avec des modalités attrayantes. Nous qui avons la grâce de croire au Christ, révélateur du Père et Sauveur du monde, nous avons le devoir de montrer à quelles profondeurs peut porter la relation avec lui.

La grande tradition mystique de l'Église, en Orient comme en Occident, peut exprimer beaucoup à ce sujet. Elle montre comment la prière peut progresser, comme un véritable dialogue d'amour, au point de rendre la personne humaine totalement possédée par le Bien-Aimé divin, vibrant au contact de l'Esprit, filialement abandonnée dans le cœur du Père. On fait alors l'expérience vivante de la promesse du Christ : « Celui qui m'aime sera aimé de mon Père ; moi aussi je l'aimerai, et je me manifesterai à lui » (Jn 14,21)...

Oui, chers frères et sœurs, nos communautés chrétiennes doivent devenir d'authentiques écoles de prière, où la rencontre avec le Christ ne s'exprime pas seulement en demande d'aide, mais aussi en action de grâce, louange, adoration, contemplation, écoute, affection ardente, jusqu'à une vraie « folie » du cœur. Il s'agit donc d'une prière intense, qui toutefois ne détourne pas de l'engagement dans l'histoire: en ouvrant le cœur à l'amour de Dieu, elle l'ouvre aussi à l'amour des frères et rend capable de construire l'histoire selon le dessein de Dieu.

Bienheureux Jean-Paul II
Lettre Apostolique « Novo millennio innuente » § 33

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19 juin 2012

Sortir du quotidien

     

               Le monde est fou.  Il court trop vite pour nous.  Pour s'y faire une place, tous les coups sont permis: ça passe ou ça casse.  Le monde court et ne laisse pas de place pour les rêves.  Il est couleur grisaille, couleur trottoir.  Le ciel est trop loin, caché par le béton.

               Parfois, il y a en nous le désir d'un ailleurs, la quête d'autre chose.  Nous voudrions poser les valises de nos problèmes, les laisser là et nous en aller.  Nous voudrions sortir de cette sensation d'écrasement et d'impuissance.  Ce sentiment d'inutilité de tâches répétitives dont nous avons oublié le sens.

               Alors, il devient urgent de retrouver la source de notre vie.  Oublier le goût et les bienfaits de cette eau qui nous revivifier est pire que d'avoir soif.  Cette source peut être, pour nous, un lieu signifiant, une activité apaisante, un temps de méditation ou de prière, une rupture utile qui nous recentre sur l'essentiel.

               L'important, c'est de retrouver l'unité de notre personne, alors même qu'elle semble perdue: lorsque notre esprit et notre cœur ne sont plus dans nos gestes et nos actions.

"Aux racines d'un rêve" Ed. su Signe, p. 87

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17 juin 2012

Pourquoi Jésus donne-t-il son corps et son sang ?

 

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... L’Eucharistie, le Pain de vie n’est pas une potion magique, une pastille comme disait un enfant ; » Mr, j’ai pas eu la pastille » (on n’a qu’à prendre du pain convenable), un produit miracle qui va me rendre meilleur par miracle, à force de le recevoir tous les jours.

Partager le pain de vie, c’est prendre au sérieux la vie de l’homme en sachant qu’elle est le lieu où Dieu me fait signe, se rend présent et se donne dans toute la proximité possible. Le pain quotidien de la vie de l’homme devient le pain de Dieu, comme si la nourriture terrestre nous ouvrait, à une nourriture autre, renouvelée par la vie donnée du Christ.

Faire Eucharistie, c’est aussi faire mémoire de l’alliance scellée entre Dieu et l’homme. « Souviens-toi, n’oublie pas tout ce que Dieu a fait pour tes pères. Rappelle-toi que tu es chrétien parce que d’autres l’ont été avant toi ». Fais mémoire dans ta vie des moments de foi où Dieu t’a interpellé et conduit…Alors chaque Eucharistie nous ouvre au monde, à l’histoire de l’humanité.

Communier, c’est se rappeler que Dieu nous a aimé le premier et qu’il nous prend au sérieux, puisqu’il se donne à nous en nourriture. En Jésus, ce n’est pas un pain aseptisé mais le nôtre avec toute l’épaisseur et les lourdeurs de nos vies, avec les joies et les peines, notre péché et notre amour que Dieu prend à son compte pour en faire un pain de vie éternelle, pain d’amour de paix et de Justice, de pardon et de renaissance.

Prenons-nous notre vie au sérieux ? De quoi la nourrissons-nous ? C’est l’Esprit qui nous ouvre le sens même de ce pain et de ce vin, C’est dans l’Esprit que nous pouvons reconnaître en eux la présence de vie donnée et ressuscité du Christ, son Corps et son sang. 

André van der Sloot sdb

 

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13 juin 2012

UN ROI SANS PUISSANCE

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Il dit qu’il est la vérité.

C’est la parole la plus humble qui soit. L’orgueil, ce serait de dire: la vérité, je l’ai. Je la détiens, je l’ai mise dans l’écrin d’une formule. La vérité n’est pas une idée mais une présence. Rien n’est présent que l’amour. La vérité, il l’est par son souffle, par sa voix, par sa manière amoureuse de contredire les lois de pesanteur, sans y prendre garde.

Que des millions d’hommes se soient nourris de son nom, qu’ils aient peint son visage avec de l’or, fait retentir sa parole sous des coupoles de marbre, cela ne prouve rien quant à la vérité de cet homme. On ne peut accorder crédit à sa parole en raison de la puissance historique qui en est sortie: sa parole n’est vraie que d’être désarmée.

Sa puissance à lui, c’est d’être sans puissance, nu, faible, pauvre, mis à nu par son amour, affaibli par son amour, appauvri par son amour.

Telle est la figure du plus grand roi d’humanité, du seul souverain qui ait jamais appelé ses sujets un à un, à voix basse de nourrice. Le monde ne pouvait pas l’entendre. Le monde n’entend que là ou il y a un peu de bruit ou de puissance. L’amour est un roi sans puissance, Dieu est un homme qui marche bien au-delà de la tombée du jour.

Christian  BOBIN, écrivain.
Extrait de « l’homme qui marche », éd. Le temps qu’il fait


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et la présentation diaporama de notre prière de la semaine : Semeur de sourires

 

12 juin 2012

L'éloge de la faiblesse

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C’est le premier jour du printemps 1999, mais tout est gris et calme dans les rues de Rome.

La Communauté de S. Egidio nous a invitées à une célébration solennelle: c’est aujourd’hui que naissent Les Amis, un groupe de cinq cent handicapés environ qui se définissent comme ‘la liesse du monde’. Ils se sont rassemblés dans un théâtre tout en couleurs et ils font la fête toute l’après-midi en s’appelant par leur nom, en chantant des chansons connues. On dirait qu’ils sont heureux. Ils sentent qu’ici on les considère comme des personnes, malgré leur différence.

A la fin de cette réunion, ils lisent lentement leur carte d’identité qui est aussi une déclaration d’intentions.  Ils disent entre autres « Nous avons une grande envie de faire la fête et de changer le monde.  Commençons par nos villes. Construisons une ville sans barrières et sans murs entre les personnes, où chacun écoute l’autre, car il n’y a pas de hâte. C’est la ville amie. C’est « la ville des Amis ». La déclaration est indirectement une demande de citoyenneté de la part de ceux qui sont plus faibles et qui ont besoin d’une insertion douce pour exprimer toutes les possibilités, souvent considérées de deuxième zone, qu’ils cachent en eux.

Un jour, il n’y a pas si longtemps, Tonino Bello, l’évêque au tablier, a fait une découverte semblable en Amérique Latine. Il était à Bariloche, centre touristique de la haute bourgeoisie argentine, pour comprendre ce que le Pape voulait dire quand il affirmait que les riches sont de plus en plus riches et les pauvres de plus en plus pauvres. 

L’évêque a donc laissé derrière lui les villas luxueuses, les hôtels à cinq étoiles et s’est fait conduire vers la banlieue où il y avait des taudis, de la boue et de la misère. Accompagné par une fillette, il est entré dans une baraque où il a trouvé désolation et affreuse misère. Une femme tenait dans ses bras un enfant endormi et en avait cinq autres autour d’elle.

« Sur le feu bouillait une casserole de fèves — raconte l’évêque —. Dans un coin, deux chaises dépaillées. Par terre un large grabat. Suspendue à une corde, la dernière lessive. Ma curiosité fut attirée par un livre ouvert sur la table, à côté d’une pile d’assiettes et de bols.  C’était l‘Évangile.  J’eus un frémissement d’émotion. J’avais l’impression d’être entré chez un de mes proches et j’essayai de dire à cette femme: « Je suis très heureux que vous lisiez l‘Evangile ».     

A ce moment-là elle, qui était restée en silence jusqu’alors, ouvrit la bouche et murmura avec une toute petite voix qui m’est entrée dans l’âme et qui n’en est plus jamais sortie “L’unica esperanza para nuestra pobreza”, c’est notre unique espoir dans notre pauvreté.

Le mystère de la souffrance a été déclaré par les Béatitudes une carte d’appartenance à la citoyenneté évangélique et c’est une carte de reconnaissance encore valable aujourd'hui...


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